Toute une moitié du monde, Alice Zéniter : Mon avis

Zéniter Alice - Éditions : Flammarion
1 septembre 2022
10Commentaires

Quatrième de couverture :

« S’il y avait un message diffusé dans des haut-parleurs avant l’entrée en territoire de fiction, il ressemblerait, curieusement, à celui des assurances ou des banques jointes par téléphone : Patientez quelques instants, vous allez être mise en relation… Ce que je cherche, sans doute, depuis le début, en tant que lectrice et en tant qu’écrivaine, ce sont des récits qui me permettent d’entrer en relation avec des êtres qui me sont inconnus et me deviendront proches, tout comme des récits qui leur permettent – à l’intérieur de la fiction – des relations riches, complexes et fragiles. » Avec Toute une moitié du monde, Alice Zeniter écrit un livre hautement stimulant, fondé sur ses expériences personnelles de lectrice avant tout, mais d’écrivaine aussi, un livre qui nous invite à repenser nos façons de lire les histoires qu’on nous raconte. C’est aux lecteurs que nous sommes qu’il s’adresse, c’est avec eux qu’il converse, avec autant de sérieux que d’allégresse, autant d’humour que d’érudition. Ce livre est tout simplement l’histoire d’une femme qui aimerait qu’on ouvre en grand les fenêtres de la fiction.

 

Questionnements sur la fiction.

Très peu coutumière des rayons documents en librairie, je serais probablement passée à côté du nouvel ouvrage d’Alice Zeniter en utilisant le schéma classique. Feuilletant le catalogue de rentrée littéraire du réseau Maison de la presse, j’ai jeté mon dévolu sur Toute une moitié du monde, sans savoir qu’il s’agissait d’un essai. Une fois le livre dans ma boîte aux lettres, j’ai compris que j’allais, une fois de plus, sortir des sentiers battus !

Contrairement à ce qu’en ont dit les statistiques depuis, le confinement du printemps 2020 n’a pas été propice à la lecture pour Alice Zeniter. Si les français disent s’être remis à la littérature, l’écrivaine ressent à ce moment-là un rejet pour la fiction. En cause : le modèle obsolète proposé dans les romans. Alors, l’autrice s’interroge. La fiction peut-elle distraire en éduquant ?

Loin du roman et du célèbre L’Art de perdre (Flammarion, 2017, prix Goncourt des lycéens), Toute une moitié du monde s’approche de l’essai littéraire. L’autrice s’en défend pourtant, en préliminaire de son ouvrage : « Si on considère ce livre comme un essai, il ne se comportera pas tout à fait bien. Il désobéira ici ou là. Il manquera à ses obligations de sérieux. » Et, de préciser : « Si on le considère comme une rêverie autour de la fiction, il péchera au contraire par excès de sérieux de temps à autre. »

 

 

« Ce livre est un livre d’écrivaine mais sans doute avant tout un livre de lectrice. Il porte sur de vieux souvenirs de lecture comme sur des livres récemment ouverts et posés sur la table de chevet. Sa cohérence vient du fait que les ouvrages dont je parle, c’est moi qui les ai lus et qui continue à en porter les bribes, des fantômes de phrases ou de personnages, des paragraphes tronqués et devenus ritournelles. Je suis ce qui transforme en ensemble les livres si différents que je cite. »

 

Alors, comment en parler ? Comment résumer Toute une moitié du monde ? Si la structure ne se veut pas académique, le ton, lui, est résolument féministe, dénonciateur et engagé. Évoquant sa condition d’autrice et, par exemple, les comportements de la gente masculine dans le milieu éditorial, l’écrivaine nomme et interroge. A travers des extraits de films, de livres ou sa propre expérience, Alice Zeniter démontre son propos. Le texte est jonché de notes de bas de page, documentant ainsi les références culturelles exposées.

Après un début révoltant et inspirant, l’abondance de parenthèses et de digressions se font ressentir sur la seconde partie. L’essai n’en est pas moins intéressant. Il interpelle, questionne et fait parfois sourire. Il est aussi source pertinente d’idées de lecture.

J’ai aimé l’audace d’Alice Zeniter, et je suis maintenant curieuse de découvrir ce qu’elle propose dans la fiction.

 

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Quel autre essai sur la littérature me recommandez-vous ?

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Commentaires (4)
Sabrina2022-09-29 16:30:05Répondre

Je ne lis pas beaucoup d'essai mais là j'ai envie d'essayé. J'ai adoré L'art de perdre, j'aime la plume de l'auteure. Ca a l'air très intéressant.

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mademoisellelit2022-10-03 10:17:27Répondre

Il fait réfléchir et c'est ce que j'aime en littérature. :)

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solala2022-09-13 19:39:14Répondre

Bonjour Maité,
Pour tout te dire, cette autrice me fait de l'œil depuis des années et je n'ai jamais osé franchir le cap... J'attendais depuis cet été ta chronique car tu avais dit que tu en parlerai plus en détails à la rentrée. :) J'adore ce que tu en dis et cela me donne résolument envie de le lire...! Je te remercie encore pour cette invitation à lire Alice Zeniter...:)

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mademoisellelit2022-09-14 10:49:56Répondre

J'en suis ravie Soraya ! J'espère qu'il te plaira. Je compte sur toi pour me faire un retour de lecture. ;)

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Fabienne2022-09-02 11:54:57Répondre

Intéressant, merci...Pour moi, si vous voulez découvrir Alice Zeniter, je vous conseille son roman "L'art de perdre". Il traite de l'histoire de toute une famille algérienne (sa famille ?) et de son arrivée en France, son intégration, etc. A lire, vraiment.
Et comme essai sur la littérature, j'ai pris beaucoup de plaisir à la lecture de "Lire !" de Bernard Pivot et sa fille. Ce n'est pas un livre véritablement "engagé" comme vous semblez décrire celui d'Alice Zeniter mais sous forme de courts chapitres, à travers les réponses de Pivot et sa fille, il interroge nos pratiques de lecteurs, c'est plutôt amusant, avec de très belles photos de lecteurs en tout genre : James Dean, Obama, les quais de Paris...
Merci pour vos chroniques. Je suis bibliothécaire, j'ai découvert votre blog il y a peu de temps mais depuis je vais régulièrement vous lire quand je prépare une commande. Je suis souvent d'accord avec vos critiques et j'aime votre façon de parler de vos lectures.

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mademoisellelit2022-09-02 17:29:59Répondre

Merci Fabienne. Vos mots me touchent beaucoup.
Nous avons évoqué L'art de perdre lors d'un petit déjeuner littéraire que j'anime sur Paris, et ça m'avait déjà donné très envie de le découvrir. Je connais mal cette partie de la guerre d'Algérie.
Quant à Lire de Cécile et Bernard Pivot, j'en ai entendu parler sur les réseaux. Vous allez me convaincre de me lancer !

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Caroline2022-09-04 20:21:00Répondre

J’ai aussi lu « l’art de perdre » il y a quelques temps et j’ai beaucoup aimé. Je crois que c’est son histoire à elle. J’aime sa façon d’écrire, je serais ravie de lire prochainement son dernier livre de « fiction »

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mademoisellelit2022-09-05 10:17:11Répondre

L'art de perdre est un roman, pas une autobiographie ;)

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Justine2022-09-01 22:41:15Répondre

Bonsoir,
Je ne suis habituellement pas une adepte de la rentrée littéraire (que j’ai même plutôt tendance à fuir pour tout dire), mais ce livre me fera sans aucun doute déroger à cela cette année ! J’avais lu à sa sortie *Je suis une fille sans histoire* de la même autrice aux Éditions de L’Arche, que j’avais absolument adoré. Les mêmes thèmes semblent y être abordés, bien que dans un format différent. Bref, tout ça pour dire que *Toute une moitié du monde* fera partie de mes prochaines lectures, c’est une certitude

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mademoisellelit2022-09-02 10:00:21Répondre

Bonjour Justine,
J'ai découvert l'existence de l'essai que vous citez en évoquant Toute une moitié du monde sur les réseaux. Je ne savais pas que l'autrice avait déjà traité du même sujet dans un livre. J'ai très envie de compléter ma découverte avec sa lecture maintenant.
Je compte sur vous pour me faire un retour de votre lecture concernant celui-ci. ;)

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