L’hospitalité au démon, Constantin Alexandrakis : Mon avis
Le pitch ?
Quelques mois après l’arrivée de sa fille, le narrateur est saisi par des images d’attouchements vécus dans l’enfance. Insidieusement, les souvenirs remontent à la surface, lui faisant craindre la répétition d’un schéma paternel.
Si le « Père » n’a pas connu son géniteur, il a subi ces actes de la part d’un proche de la famille, qu’il considérait comme son père de substitution.
Malgré une prise de conscience, l’angoisse occupe soudainement tout l’espace. L’auteur veut se libérer du démon qu’il porte en lui.
Les points forts du livre
- une prise de parole essentielle : derrière un imaginaire rassurant, plongeant son héros dans un Danemark fictif, Constantin Alexandrakis témoigne de sa propre expérience. Avec courage, dureté, l’écrivain livre les terreurs d’un père abîmé et blessé. Son combat relate d’un véritable appel à l’aide, que personne ne semble entendre. Si les récits de victimes d’abus sexuels existent aujourd’hui, la majorité provient de femmes. J’ai trouvé le point de vue de Constantin Alexandrakis intéressant, et nécessaire.
Ce que j’ai moins aimé
- un ovni : par la singularité de sa plume et son ton si particulier, L’hospitalité au démon est proche de ce qu’on pourrait appeler un objet littéraire non identifié. Entre l’essai et la fiction, l’écrivain se perd parfois dans le flou ou la complexité de ses pensées. Acronymes, répétitions, métaphores et autres polices d’écritures bizarroïdes ont eu raison de mon intérêt de lecture. J’ai aimé le fond, beaucoup moins la forme.
- un sentiment de déjà vu : au-delà de l’autofiction, l’auteur évoque différentes œuvres culturelles dérangeantes ou dénonçant la pédocriminalité. Comme sa consœur* avant lui, il revient par exemple sur l’histoire du roman Lolita de Vladimir Nabokov.
En bref, j’ai eu l’impression de lire la version masculine de Triste tigre dont l’autrice introduit ici le propos. J’ai préféré la clarté du discours de Neige Sinno, à la noirceur de la pensée de Constantin Alexandrakis.
Mots-clés : violences sexuelles, témoignage, pédocriminalité, éducation
Une citation : « On se contrefout de la littérature. Il va falloir dire la violence, avec clarté et dignité. C’est le but. Un travail sur soi et sur les mots, pour essayer d’expliquer aux autres à quel point la vie peut être bizarre et dégueulasse. Parce que personne ne veut le savoir. Que c’est général. Que c’est partout, tout le temps, avec ton cousin, ton père, ton frère, ton voisin, ta mère. On est nombreux-nombreuses à être seul avec ça. Légion. »
Quelques mots sur l’auteur : Constantin Alexandrakis est un écrivain français, né en 1978. Son premier livre, Deux fois né, est paru en 2017 aux éditions Verticales. L’hospitalité au démon est son second ouvrage.
À lire aussi : préfacé par Neige Sinno, l’ouvrage de Constantin Alexandrakis rappelle comme je l’écrivais plus haut Triste tigre. Deux mois après sa sortie en 2023, je le chroniquais dans cet article.
*Dans son ouvrage Triste tigre, paru aux éditions P.O.L en août 2023, Neige Sinno propose une analyse du même titre.
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Aviez-vous lu Triste tigre ? Le livre de Constantin Alexandrakis vous tente ?
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