Il ne faut rien dire, Marielle Hubert : Mon avis
Quatrième de couverture :
Il y a des livres qu’on lit aux enfants pour les endormir.
Il y a ce livre que j’écris pour faire mourir ma mère en paix.
Face au silence de sa mère sur les traumatismes de son enfance, l’auteure invente les personnages d’une fiction qui lui sert d’exutoire.
Composé de Sylvette, personnage principal fictif, Armand, son père monstrueux et Simone, la mère complice et passive, le récit retrace une histoire de famille sombre aux conséquences dévastatrices sur plusieurs générations.
Une vive et violente émotion.
Deux, trois phrases percutantes aperçues en story sur le compte d’une lectrice, un titre énigmatique et une nouvelle plume à découvrir ont suffit à me convaincre de lire Il ne faut rien dire de Marielle Hubert. Paru aux éditions P.O.L en janvier dernier, il s’agit du second ouvrage de l’écrivaine.
“J’ai hâte qu’elle meure“. Dès le troisième paragraphe de son récit, la narratrice donne le ton. Atteinte d’un cancer généralisé, sa mère, Sylvette, est mourante depuis des mois, voire des années. La malade s’accroche à la vie, au grand désarroi de sa fille qui espère en vain une libération. Cette volonté ne dissimule aucune compassion. Sylvette ne souffre pas, et se croit encore immortelle, malgré tous les diagnostics médicaux annoncés.
Comment sa fille peut-elle souhaiter sa mort ? Et pourquoi, comme elle l’énonce également, cette femme ne ressent que désamour pour sa génitrice ? Que révèlent ces pensées immorales ?
“Je ne peux pas parler du trou noir directement. Je n’y vois rien. Me restent le vertige et la nausée. Tout ce que je perçois de l’histoire de Sylvette et de ses parents est le silence qui persiste et frappe quiconque s’approcherait trop près des détails.”
Singulière et percutante, la langue de Marielle Hubert ne ressemble à aucune autre. Sa musique s’apprivoise doucement, pour ensuite ne plus vous lâcher. Heurtée par la violence des propos, j’ai cherché à démêler, à lire entre les lignes. Pour nous aider à comprendre, l’écrivaine raconte l’enfance de Sylvette, qui semble s’être arrêtée à l’âge de 5 ans.
Derrière la fiction, une réalité existe. En inventant le passé de sa mère, Marielle Hubert tente de dénouer la relation complexe qu’elle entretient aujourd’hui avec elle. Comme le lecteur, l’autrice part en quête de réponses. Le roman vient combler ce que la vraie vie ne permet pas. Et c’est brillamment orchestré.
Malgré tout, j’ai le sentiment que cette lecture sera peu à peu oubliée. J’ai été embarquée par le phrasé original de la romancière. J’ai été choquée par la virulence de son texte. Pourtant, un mois plus tard, ma mémoire a effacé les petits détails qui constituent l’histoire de Sylvette. La rédaction de cette chronique m’en donne la preuve. Est-ce si grave ? Je ne crois pas, si j’additionne toutes les fois où cela arrive…
A lire aussi : dans son ouvrage Triste tigre, Neige Sinno a décidé de tout dire. L’autrice raconte l’inceste subi, elle s’interroge sur son bourreau et réfléchit au “pourquoi ?”. L’écriture de Marielle Hubert m’a rappelée celle de Neige Sinno. Ma chronique de Triste tigre est à relire par ici.
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Ce livre vous tente ?
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